Les histoires de toutes les personnes que j’ai assistées m’ont marquée à vie. Tous ces défis relevés avec ces femmes au quotidien difficile, celles devant travailler jusqu’à la fin du terme de leur accouchement ou accouchant à domicile, mais aussi ces naissances heureuses et toutes les familles qui accueillent avec joie leur nouveau-né.
Najat, sage-femme depuis plus de vingt ans, se réjouit d’avoir fait partie de la première promotion formée à Tétouan à la profession de sage-femme.
J’ai toujours été animée par l’action orientée sur l’être humain, en particulier le travail de proximité avec les femmes. Durant toutes ces années passées, j’ai combiné travail de terrain et formation continue. Aujourd’hui, je suis encadrante de sages-femmes en formation de base.
Les sages-femmes sont dévouées et font un travail qui peut sauver d’innombrables vies de femmes et de nouveau-nés dans le monde. En effet, chaque année, 340,000 femmes continuent de mourir pendant la grossesse et l’accouchement et 3 millions de bébés ne survivent pas au premier mois de vie.
Plus des deux tiers de ces décès maternels et néonatals auraient pu être évités s’il y avait un nombre suffisant de sages-femmes qualifiées, bénéficiant de ressources adéquates à travers le monde.
Au Maroc aussi, près des trois quarts des décès maternels sont évitables (selon les données de 2010 de l’enquête audit confidentiel sur les décès maternels). Par ailleurs, plus que les deux tiers de ces décès se produisent en milieu rural (ENPSF 2018), là où les sages-femmes agissent comme agentes de proximité.
La sage-femme est une référence en matière de santé de la reproduction. Beaucoup d’efforts sont requis pour la reconnaissance de son champs d’intervention très large, pour la consolidation de la formation et pour la valorisation du métier.
Cette année, le monde célèbre le 25ème anniversaire de la Conférence Internationale pour la Population et le Développement (CIPD). Tenue au Caire en 1994, la CIPD a établi les droits reproductifs comme des droits humains fondamentaux.
Aujourd’hui, plus que jamais, les progrès réalisés doivent être accélérés en vue d’honorer les promesses faites au Caire et atteindre par-là l’agenda 2030 et ses objectifs de développement durable.
Les sages-femmes ont un travail fatiguant et stressant qu’elles mènent en toute responsabilité. Avec les étudiantes sages-femmes, j’insiste au-delà des compétences professionnelles, sur le développement de leurs capacités d’affirmation, de leadership, de travail d’équipe et de soins humains.
Les soins de qualité de la profession de sage-femme sont respectueux et axés sur les besoins des populations, et ces soins sans risque sont prodigués par des sages-femmes bienveillantes.
Il est primordial de reconnaitre la pratique sage-femme comme une profession autonome pour que les sages-femmes puissent acquérir les compétences requises et fournir les soins nécessaires pour améliorer la santé et le bien-être des femmes et des filles.
Plus de clarté dans le référentiel des actes professionnels et des attributions professionnelles de la sage-femme sera nécessaire dans la mise en œuvre de la nouvelle réglementation de la profession. Renforcer la formation par l’intégration d’autres modules, notamment d’initiation à l’échographie et autres compétences techniques nécessaires, en plus de la confiance en soi et l’accompagnement psychologique présenteront autant d’avantages pour ces professionnelles qui prennent, très jeunes, la responsabilité de vies humaines.
Une sage-femme qui dispose de locaux adéquats, d’une installation convenable et de moyens techniques suffisants peut mieux accompagner les femmes avant, pendant et après l’accouchement.
La sage-femme a, par ailleurs, un champs d’intervention très large. Il ne se limite pas à l’acte de l’accouchement. Elle assure ainsi également le diagnostic, le suivi de la grossesse, le postpartum, le counseling en planification familiale, le suivi de l’enfant, la vaccination, et l’accompagnement psychologique et physique de la femme.
La profession de sage-femme a forgé ma patience et ma sagesse. J’ai appris à être plus autonome et à développer mes capacités en matière de prise de décision, de travail d’équipe et de prise de responsabilité, même dans les situations les plus difficiles.
Toutes les femmes et toutes les filles ont le droit d’avoir accès aux soins de haute qualité, dispensés par une sage-femme formée et qualifiée. La sage-femme accompagne et conseille les femmes et les filles, en agissant en proximité avec la population.
Pour cela, UNFPA agit en collaboration avec plusieurs partenaires pour soutenir la formation des sages-femmes et des investissements plus importants pour accroître leur nombre et améliorer la qualité et la couverture de leurs services.
Najat poursuit ses études de Master depuis 2017. Elle a orienté sa thèse de fin d’étude sur le coaching à distance de nouvelles sages-femmes travaillant dans les zones enclavées, en utilisant les nouvelles technologies. La phase pilote de son projet a été lancée en avril, avec une grande implication de la Direction Régional de Santé de Tanger-Tétouan-Al Hoceima, de la délégation du Ministère de la Santé à Al Hoceima, Chefchaouen et Ouazzane, ainsi que l’ISPITS de Tétouan.